Le travail nous touche tous : ceux qu’il épanouit, ceux qui charbonnent dur tout en restant pauvres ou encore les chômeurs qu’il exclut.
Alors que le projet de réforme allongeant l’âge de départ à la retraite à 64 ans a été promulgué, et que ses opposants entrent en résistance, notamment par la volonté d’organiser un référendum d’initiative partagée, des Vitriotes et des Vitriots disent leur fierté ou leur souffrance au travail.
Ce qui procure à Marc le plus de satisfaction, “c’est quand je vois le patient repartir en meilleure santé qu’il ne l’était. Ça donne le sentiment du travail bien fait”. Mais il dénonce “la surcharge de travail. C’est violent : on n’accorde pas assez d’écoute aux patients et le métier perd alors de son sens”. Il relève aussi “le manque de reconnaissance. Il y a deux-trois ans, on étaient applaudis tous les soirs”.
Josette aime par dessus tout "le contact avec la clientèle, surtout les fidèles. C'est agréable de suivre un peu la vie de chacun, ses joies et ses soucis". Mais elle ressent, même si le métier évolue, "une énorme fatigue et une réelle usure du corps, surtout avec la position, les gestes répétitifs, parfois avec des charges 9kg pour les packs d'eau. Parfois c'est aussi l'impatience de certains clients qui est usante moralement".
Boulanger pâtissier depuis vingt ans, Éric cultive l’amour du travail bien fait. Le moment de la journée qu’il préfère, c’est le matin, vers 7 heures, quand la production est terminée : “toute la vitrine est installée avec les gâteaux, les viennoiseries, les snackings, le pain… La boutique est prête à ouvrir et à accueillir les clients”. Mais, “après les périodes intenses, comme les fêtes de fin d’années ou Pâques, on est épuisé et on aimerait s’arrêter pour se reposer”.
Martin aime “voir le vieux vélo réparé, nettoyé et, plus encore, organiser un espace fluide avec des outils bien rangés pour les personnes qui apprennent à devenir autonome dans leurs réparations”. Le manque de sens l'a poussé à se reconvertir. Auparavant, il se sentait “sans prise sur le réel, avec du mal à percevoir le fruit de notre travail. Les échanges étaient plutôt hiérarchiques, et j’avais peu d’autonomie”.
Christophe apprécie certains soirs “quand les habitants font coucou par la fenêtre ou attendent sur le trottoir pour nous saluer, ou quand on retrace ensemble, avec le chef, une tournée plus efficace que j’ai suggérée”. le plus dur, ce sont “les bouchons et insultes dans la rue, les bacs trop lourds et les tournées moins nombreuses, mais plus longues et fatigantes… qui permettent à la direction de payer moins de personnel”.
Le bonheur d’Alexia, 29 ans, ATSEM en école maternelle, c’est de “retrouver chaque jour les enfants contents de revenir. J’aime les aider à faire de nouvelles choses, comme reconnaître les fruits”. À son douzième jour de grève, elle relève l’aspect usant physiquement du nettoyage : “Je n’imagine pas le faire encore à 64 ans !”
