Yousrah Baadj : médecin passionnée, Vitriote engagée

“Je suis dans les transports, on a eu beaucoup d’urgences !” Les aléas de la vie de médecin en un texto. Yousrah Baadj est en stage au centre hospitalier intercommunal Henri-Mondor de Créteil. Depuis 2021, la jeune femme est interne à l’Assistance publique - Hôpitaux de Paris (APHP), en gynécologie obstétrique, la discipline qui s’intéresse à la femme et à son enfant à naître.

“On rentre dans l’intime des femmes, s’émeut-elle. Elles se livrent beaucoup à nous, la charge émotionnelle est importante...”

Yousrah a trouvé sa voie, peut-être inspirée par ses parents de formation scientifique. Si elle reconnaît avoir eu, plus jeune, “beaucoup d’appréhensions vis-à-vis du métier de médecin” en raison du “côté inaccessible”, elle a peu à peu réussi à se projeter au-delà du plafond de verre.

L’histoire commence en 1997 à Saint-Germain-en-Laye, dans les Yvelines. Yousrah est la deuxième enfant d’une fratrie de cinq, de parents algériens immigrés en France. Sa famille déménage à Vitry l’année suivante, dans le quartier du 8-Mai-1945.

“Je passais mon temps au bibliobus, se remémore-t-elle. Ça a été le début des problèmes : je rendais toujours mes livres en retard !”

De Vitry à Manchester

Petite, elle va à l’école Blaise-Pascal, puis passe ses années collège-lycée dans le privé, à Épin. C’est alors que, en 2014, elle rejoint l’association Jeunes solidaires 94, qui vient tout juste de naître. Une première expérience d’engagement riche de projets d’aide et d’entraide. Un esprit de solidarité qu’elle développe aussi avec le club de judo-jujitsu de l’Entente sportive de Vitry, où elle est inscrite depuis l’âge de 5 ans. “On est tous de milieux différents, mais sur le tatamis, on est tous les mêmes.” À la sortie du bac, Yousrah est admise à l’université Paris-Cité.

Puis, en 2017, pour sa troisième année de médecine, elle part étudier à Manchester, au Royaume-Uni. “Une des meilleures expériences de ma vie, se souvient-elle, du pétillant dans les yeux. En deuxième année de fac, après le concours, j’avais senti comme une sorte d’écrémage social un peu flippant. Et là, j’arrive dans un monde où tout est hyper multiculturel, où on s’intéresse aux autres…”

Médecin passionnée, Vitriote engagée

Et en 2020, le choc covid. Revenue en France, encore externe à ce moment-là, elle fait partie des élues représentant les étudiants. Elle s’organise avec des camarades pour déployer un système de renforts de plus de 400 étudiants :

“Je faisais le sondage des services hospitaliers demandeurs pour les affecter là où il y avait besoin… C’était très difficile pour tous, on ne voyait plus nos familles. Mais c’est la première fois où je me suis sentie utile.”

Yousrah n’arrête pas une seconde. Et ce n’est pas fini. Mordue de podcasts, elle décide de lancer sa propre émission en octobre 2022, Derrière l’empreinte, avec l’objectif de désacraliser le monde des sciences. Parmi ses invités : un médecin légiste archéologue, un chercheur en neurosciences ou une climatologue... “Je veux que, dans notre société, chacun puisse se sentir légitime de parler avec quelqu’un qui n’est pas de son milieu. En décomplexifiant certaines choses, tout le monde peut comprendre.” Et briser ce foutu plafond de verre.

Déterminée à “créer de l’espoir plus que de la désillusion” et souhaitant s’adresser aux jeunes de Vitry, Yousrah ajoute : “On manque de modèles qui nous ressemblent dans notre société. C’est à nous de les incarner, il ne faut pas attendre qu’on vienne nous chercher, il faut oser !”

Portrait réalisé par Clément Aulnette

REPÈRES
17 août 1997 Naissance à Saint- Germain-en-Laye, dans les Yvelines.
1998 Sa famille emménage à Vitry, dans le quartier du 8-Mai-1945. Puis déménagement dans le quartier Gare/ Jean-Jaurès en 2008.
Juin 2016 Affectation en deuxième année de médecine
Été 2018 Voyage au Japon avec la section judo-jujitsu de l’Entente sportive de Vitry
Sept. 2021 Affectation en gynécologie obstétrique à l’APHP.
Oct. 2022 Lancement du podcast Derrière l’empreinte.