« On fait attention à tout ! »
Publiée le 04 novembre 2022 - Mise à jour le 07 novembre 2022
Les Vitriots, comme l’ensemble des Français, souffrent de l’inflation galopante. Entre système D, petites et grandes économies et calculs quotidiens, ils nous expliquent comment ils traversent cette crise inédite.
L’électricité m’a tuée !” peste Malika, indignée de voir ses charges irrémédiablement
augmenter. “Je viens de recevoir un courrier me réclamant plus de 600 euros pour l’année alors que je paye déjà 70 euros mensuellement”, témoigne cette Vitriote du Centre-ville, qui regrette de ne plus pouvoir mettre quelques sous de côté, malgré les efforts consentis par toute la famille, son époux et son fils de 26 ans. La hausse récente du prix de l’énergie (+17,8 % en un an en moyenne) vient renforcer un phénomène au long cours. La part des dépenses contraintes dans le revenu des ménages est passée de 12 % dans les années soixante à 29 % en 2019, selon l’INSEE. Et, en tête de ces dépenses, celles liées au logement plombent le budget des ménages, surtout ceux à revenus modestes.
À cela s’ajoute la hausse actuelle des prix à la consommation, jusqu'à 20 % en un an pour certaines denrées alimentaires ! Chez Malika, on a tiré un trait sur les vacances l’été dernier : “Impossible quand tout augmente !” s’agace-t-elle. Une fois les factures payées – 700 euros pour le loyer et les charges –, l’essentiel des courses faites, chaque dépense imprévue vient ruiner tout espoir de faire une quelconque économie. Comme cette consultation chez le vétérinaire pour le chien malade, 130 euros...
Familles, étudiants, retraités... Quelle que soit la configuration des foyers, les situations peuvent s’avérer très compliquées. Face au contexte d’inflation, huit Français sur dix déclarent se restreindre sur des dépenses essentielles. Parmi eux, Jalila, 71 ans, retraitée vitriote, pour qui la rentrée ne ressemble à aucune autre : “Le prix du steak est monté en flèche... alors j’en mange moins”.
Restrictions et inventivité
Pourtant, Jalila touche une retraite de 1 800 euros par mois. Mais après avoir payé ses f rais fixes, environ 1 000 euros, cette habitante du Plateau compte tout : “Je ne vais plus sur Paris, mais concentre mes activités sur Vitry : théâtre, cinéma, atelier sculpture, marche nordique... En passant par la mairie, ces activités ne coûtent pas cher. C’est une bonne chose que la mairie fasse ces efforts, car l’isolement est un vrai problème pour les seniors”. Depuis plusieurs mois, elle récupère des vêtements donnés par la famille et les amies : “Les habits sont chers et les gens les portent souvent assez peu. Je suis ravie d’éviter d’ajouter du gaspillage au gaspillage”. Rose, à la tête d’une famille nombreuse, a dû également appliquer des restrictions tout en faisant preuve d’inventivité. Cette femme dynamique travaille dans les écoles d’une ville voisine et son mari comme fonctionnaire de police. Avec leurs cinq enfants, dont deux majeurs mais toujours sous leur toit, ils jonglent entre baisse des allocations de rentrée de la CAF, hausse de la taxe foncière, explosion des coûts de l’énergie et inflation galopante : “Contrairement aux autres années, on a récupéré les fournitures scolaires des plus grands, évité les achats de nouvelles fringues pour la rentrée et suspendu le tennis pour l’un des enfants”. Les courses se font chez les hard-discounters et, dans les assiettes, le riz et les pâtes sont souvent au menu. Adepte du système D et de la solidarité de proximité, Rose traque les bons plans comme le bois gratuit récupéré chez des particuliers pour alimenter le poêle ou les achats groupés entre voisins auprès des commerçants de Rungis. “Cette crise est aussi l’occasion d’apprendre à nos enfants à ne pas gâcher et distinguer l’essentiel du superflu”, estime-t-elle.
L’essentiel, Avren en connaît la valeur. Il est arrivé à Vitry il y a trois ans de sa Guyane natale où il a vécu dans un bidonville sans eau courante ni électricité. Cet étudiant en photographie de 24 ans vit seul dans une résidence étudiante : “Il m’est arrivé de ne pas manger pendant plusieurs jours. Le jeûne n’est pas mauvais pour la santé, les lions y arrivent bien ! Je m’accroche et me trouve chanceux d’être en France. Mon histoire personnelle m’aide à relativiser”. Faute de moyens, Avren a laissé de côté sa passion de la danse, pour se consacrer à son art, la photographie. Une activité “où le matériel reste très cher, mais, heureusement, ce n’est pas l’appareil qui fait le bon photographe. J’ai d’ailleurs reçu un prix international pour mon travail”. En contrat d'alternance depuis la rentrée dans une collectivité, il touche un peu moins d’un SMIC. Son nouveau salaire lui a permis d’acheter des vêtements neufs après trois ans de f riperie. Mais rien n’entache son optimisme : “il faut croire en ses rêves et s’accrocher !”
Willy Richert
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