Le château de Vitry-sur-Seine et l’assassinat de Petit du Petit-Val

Rue du Château, les pavés ne sont plus d’époque. Mais entre les immeubles et la place du Marché, ils rappellent qu’il suffisait autrefois de continuer tout droit pour rejoindre un château qui occupa pendant deux cents ans une grande partie du centre-ville de Vitry, face à l’église. À sa place, aujourd’hui, dans un triangle entre les avenues Paul-Vaillant-Couturier, Danielle-Casanova et Guy-Môquet, un supermarché, des immeubles, un collège.

Où se trouvait le château ? Quand et pourquoi a-t-il été démoli ? Pourquoi et comment, au lendemain de la Révolution, le châtelain de Vitry a-t-il été sauvagement assassiné, avec cinq autres personnes de son entourage ? La Société d’histoire de Vitry (SHV) s’est attelée à un intéressant travail de mémoire qu’elle présente dans une exposition "Le Château de Vitry-sur-Seine et l’assassinat de Petit du Petit-Val" à la Maison de la vie associative, du 5 au 9 octobre 2020.

À l’aide de panneaux explicatifs, de présentations de documents d’époque et de timbres, d’un film sur l’histoire du château et d’une visite virtuelle du château sur ordinateur, les visiteurs pourront en apprendre d’avantage sur Vitry dans le contexte de la période postrévolutionnaire ainsi que sur les détails de cet étrange assassinat. Ils pourront aussi  découvrir comment, il y a tout juste un siècle, ce splendide château a été l’objet de tractations et débats animés aux termes desquels, le château et son immense parc ont été détruits pour céder la place à l’urbanisation.

La conférence du mardi 6 octobre ne sera pas accessible au public. Elle sera filmée puis retransmise ultérieurement.
"Les châteaux disparus du Val-de-Marne"
Conférence d’Élise Lewartowski des Archives départementales du Val-de-Marne

Une sombre histoire

En 1791, le château est acheté par le chevalier François Gaspard Petit du Petit-Val, receveur général des Fermes. Il est veuf, très riche, et il souhaite que son jeune fils malade, Alexandre, puisse profiter du “bon air et de la bonne eau” de Vitry ! La Terreur s’achève à peine. Dans la nuit du 20 au 21 avril 1796, Petit du Petit-Val se promène dans le parc du château quand un groupe d’hommes l’attaque. La suite est sanglante.

Au petit matin, six corps sont retrouvés, mutilés. Il s’agit du châtelain, dont la main est coupée, de sa belle-mère, de deux de ses sœurs et de deux domestiques. Son fils est sain et sauf. “Sur place, des indices – un sabre, un morceau d’uniforme – laissent croire que la police est impliquée. Mais ce n’est peut-être qu’une mise en scène”, relève Jean-Michel Vuitton, de la Société d'histoire de Vitry. La presse se déchaîne alors pour comprendre le mobile du crime.

Première piste : la famille. Alexandre, le fils et seul héritier du châtelain, est gravement malade. Celui qui sera son tuteur touchera le pactole. Deuxième piste : les banquiers. Petit du Petit-Val a prêté beaucoup d’argent et le faire disparaître permet d’effacer les dettes. Troisième piste : la politique. François Gaspard, “qui mangeait un peu à tous les râteliers, était peut-être corrompu, finançant aussi bien la famille royale que les Républicains”, avance Jean-Michel Vuitton. Il a pu déplaire aux révolutionnaires, comme aux Chouans royalistes, qui n’étaient pas tendres avec les profiteurs.

Mais l’enquête ne mène finalement... nulle part, le dossier de police disparaît rapidement. Encore plus bizarre : après la mort du jeune Alexandre, c’est le préfet de police de l’époque, le comte Dubois, qui rachète le château. À l’endroit où le corps de Petit du Petit-Val a été retrouvé, il fait construire une chapelle “expiatoire”. A-t-il des choses à se faire pardonner ?

En savoir plus sur le Château de Vitry : "Le Roman noir du château de Vitry" - Le Mensuel - mensuel municipal d'informations locales de la ville - octobre 2020